Thursday 21 April 2011

Après-midi Londonien


Dans la pénombre, le générique se déroule, mécaniquement. Je sors peu à peu de l’ambiance du film. Quittant l’écran, mon regard glisse sur la table, jonchée des reliefs du diner-crêpes. Les enfants somnolent, Jean bouquine. Je serai seule à ranger.

De guerre lasse, je me renfonce dans le Chesterfield, tentant de prolonger de quelques minutes la fin de cette institutionnelle oisiveté. Comme pour mieux signifier ma mise hors circuit, je ferme les yeux et bascule la tète en arrière.

La musique du générique est typique du film tous publics : à la fois banale et moderne. Je reconnais une version jazz du morceau préféré de Maman. 

Elle nous l’a encore servi cette après midi. Le rituel est immuable. On la sent d’abord tourner en rond et se diriger lentement vers les CD. Un hasard feint la fait choisir ce requiem, ouvre sa boite et saisit le CD en insérant le tiers de son auriculaire en son centre. Elle commande ensuite l’ouverture du chariot à CD, qui, en obtempérant, produit le grincement mécanique. Il sonne le glas de la sieste et annonce le début d’un période de désœuvrement collectif. Chacun s’emploiera à rationner ses gestes, comme pour mieux digérer les rognons au roquefort. 

Que j’aime ces après midis pluvieux ou l’on retourne en enfance. Je les appelle mes après-midi londoniens. A l’abri des bombes, chaudement près du feu. Le morne ciel hivernal est alors une bénédiction.

Le menu du DVD et son horripilante musique surgissent. Je redresse péniblement la tête. La trêve est finie : demain, une nouvelle semaine commence.

Texte rédigé pour les impromptus littéraires dont l'original thème cette semaine était d'écrire ce que nous inspire la Pavane de Fauré.

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